« Jude? » La dénommée Jude releva doucement la tête, ses cheveux bruns, légèrement tenus en arrière par un serre-tête rouge afin de ne pas avoir de mèches dans les yeux, suivant parfaitement le mouvement. Sa belle-mère et professeur d'arts plastiques, Sam, l'observait d'un air inquiet. « Oui S... Mrs Romanov-Lloyd? » Elle avait failli faire la connerie de l'appeler Samantha - c'était une grosse erreur, car, à la maison, c'était Judie et Sam, et à l'école, c'était Jude et Mrs Romanov-Lloyd. Le changement était parfois dur à appliquer, c'était vrai. Le pire dans l'histoire, c'est que la nouvelle femme de son père n'était pas la seule personne avec qui Jude devait faire attention sur ce point. Si elle se mettait à appeler le professeur de littérature, Mr Jones, Ezeckiel en plein cours, ça paraîtrait louche. Roxanne Jude revint sur Terre et fixait le doux visage, dont on percevait facilement de l'inquiétude, du professeur Romanov-Lloyd. L'adolescente lui fit comprendre en un regard qu'elle allait bien. « Restes concentrée, s'il te plait. » Elle essayait, mais, malgré tout, les pensées de Jude restèrent fixées sur Ezeckiel, qui, en cet instant même, faisait cour quelques salles plus loin.

Midi sonna et les élèves rassemblèrent leurs affaires dans un brouhaha immense, mais Jude le fit calmement. C'est toujours pensive qu'elle accompagna ses amies à la cafétéria, qu'elle prit son plateau et les rejoints à une table. C'était compliqué de vivre un amour aussi interdit que cela. Se cacher, sans cesse. Ils ne pouvaient pas, manger ensemble, se tenir la main en public, passer du temps ensemble sans se cacher, en dehors du lycée. Ou alors il fallait se faire discrets, très discrets. Au début, il était clair que il y avait de l'excitation due au fait de se cacher constamment. Mais avec le temps, cette excitation avait disparue et avait laissée place à quelque chose d'autre; non, Jude n'était pas lassée de cette relation, elle était lasse de se cacher. Elle voulait rendre son amour public, mais c'était impossible. Sinon, tout allait retomber sur Zeck. L'amour était-il donc un crime? Peut-être que non, mais ça en avait tout l'air. Jude soupira, faisant doucement rouler sa pomme d'un bout à l'autre du plateau. Qu'allait-il donc se passer s'ils se faisaient prendre? Déjà qu'Alec, son demi-frère, les avait surpris... Les deux jeunes Lloyd n'en avaient jamais parlés, mais Jude savait qu'il garderai ça pour lui. D'ailleurs, ça faisait un bail qu'ils ne se parlaient plus, ces deux là. Mais pour l'instant, ça n'avait pas d'importance aux yeux de Judie. « Tu bouffes pas ta glace?! » Demanda une de ces camarades. Sans répondre, Jude lui tendit le dessert que l'adolescente s'empressa de prendre et de la remercier. Elle n'avait pas bien faim, à vrai dire. En parlant de ses camarades. Chacune était en extase devant le professeur Jones... Et malgré tout, Jude était de nature assez jalouse et ça, personne ne pouvait y changer quelque chose. Elle se contentait de lever les yeux au ciel et de participer aux conversations à propos du professeur en restant le plus calme et le plus « normal » possible. Dieu seul savait à quel point c'était dur. Elle soupira, se leva, alla débarrasser son plateau et quitta le self, en direction de la salle de littérature.

Elle arriva enfin à destination, tourna la poignée de la porte. Toutefois, elle n'eut pas le temps de le faire, puisqu'elle s'ouvrit à la volée et qu'elle se retrouva nez-à-nez avec Ezeckiel. Aussitôt, son cœur partit à une vitesse folle. Ça pouvait paraître étrange, mais Jude n'avait "vraiment" ressentit cela. Elle était pourtant sortit avec d'autres garçons avec Zeck, des adolescents, des gens de son âge. Mais rien comparé à cela. Elle aimait vraiment Zeck, elle était même certaine qu'il était l'homme de sa vie, celui avec lequel elle finirait ses jours. À dix-sept ans, être certaine de ça, c'était déjà beaucoup. Il jeta un regard au couloir - qui était désert - puis, attrapa la main de sa petite-amie et la tira à l'intérieur et ferma la porte derrière elle. « Tu ne devrais pas être ici. » Son ton était dur, mais il lui offrait un sourire resplendissant, auquel Jude ne pouvait que répondre, tendrement. « Disons que j'ai appris par ma belle-mère et professeur d'arts plastiques que ce pauvre professeur Jones mangeait seul à midi... » Elle continua de sourire. Il lui avait tant manqué! Ils ne s'étaient pas retrouvés en tête-à-tête depuis quelques jours déjà, faute de temps. Oh, certes, ils s'étaient vus entretemps, mais ils n'étaient pas seuls, puisqu'il y avait une vingtaine d'autres élèves autour d'eux. Elle poursuivit ensuite, lorsque la main de son professeur vint caresser sa joue. « ...Je me suis dite que je pourrai, hum, aller lui tenir compagnie. »

Judie ne savait absolument pas ce que lui réservait l'avenir. Et encore moins si Ezeckiel en ferai partie. Certes, ce n'était pas l'envie qui manquait - elle se voyait très bien finir ses jours avec lui, en fait - mais c'était si dangereux... Déjà rien que là, c'était presque suicidaire. Heureusement que leurs camarades et collègues étaient en train de manger, chez eux ou à la cafète, ce qui limitait les dangers. Que se passerai-t-il, s'ils se faisaient prendre? Jude n'en savait rien non plus sur ce point. De toutes façons, il ne la forçait à rien, ils étaient amoureux, c'était tout. Toutefois, Jude était fatiguée de mentir à tout le monde. C'était quelqu'un de très honnête, certes excellente menteuse et comédienne, et elle détestait mentir à ses proches. Et répondre aux « Judie, tu vas où? » par un « je vais squatter la salle de répét' » ou par un « je vais chez machin » était très compliqué pour elle. Que ferai son père s'il l'apprenait? Ancien avocat, il saurai mettre toutes les chances de son côtés pour que ce pauvre professeur de littérature se retrouve sous les barreaux. Sans compter Andrew, le meilleur ami sur-protecteur, qui ne se gênerait pas pour aller voir Ezeckiel et lui foutre une belle droite en pleine figure. Et comme de juste, c'était Zeck qui prenait tout, pourquoi? Parce que c'était un adulte. Dans un an et quelques la question serai presque réglée, plus de détournement de mineur. Seulement le fait qu'une liaison professeur-élève était interdite, les dangers étaient déjà minimisés. Parfois Jude était impatiente de quitter le lycée, de rentrer dans la vie active. Là alors, elle et son amoureux n'auraient plus besoin de se cacher et ils pourraient vivre heureux, comme un conte de fées. Mais à tous les coups, il y aurai autre chose, mais ça, la jeune Hemingway-Lloyd s'en fichait royalement. Elle aurai Ezeckiel à ses côtés. Et rien d'autre n'aurai d'importance.

« Vraiment ? Il ne faudra pas que j’oublie de la remercier la prochaine fois que je la croise dans ce cas. » C'était purement ironique et ça, Judie le savait très bien. À vrai dire, elle le voyait mal aller voir sa collègue pour la remercier. Ça aurai l'air comique, c'est vrai. Samantha avait glissé cette petite note pendant une des nombreuses discussions avec sa belle-fille, détail que cette dernière n'avait pas oublié. Il rapprocha doucement son visage du sien et posa ses lèvres sur les siennes, tendrement. Le cœur de l'adolescente continuait à battre la chamade tant dis qu'elle y répondait avec tout l'amour dont elle était capable de faire passer à travers ce baiser. Chacun d'entre eux étaient précieux pour les deux jeunes amoureux tellement ils étaient rares. Jude ne voulait qu'une chose : que ceux-ci se fassent nombreux, tous les jours. Mais pour cela, il fallait attendre et la patience n'était pas le fort de la brunette, ça, tous ses proches le savaient. Mais elle le devait et le faisait. Par amour, sans aucun doute. Jamais, par sentiments, elle n'aurai été capable de cela. D'attendre. Peut-être seulement pour Andrew, mais là, c'était différent, c'était un amour purement fraternel, malgré que leur proximité faisait souvent planer le doute dans leur entourage. Mais ce qu'elle ressentait pour Zeck, elle ne l'avait jamais ressentit auparavant. Dans toutes ses relations amoureuses, il avait manqué quelque chose. Tantôt de la passion, tantôt de la tendresse. Ou même de l'amour, totalement. Une simple relation d'intérêt. « Mon cœur, tu sais que je t’aime, je t’aime plus que tout au monde, mais … » Elle ne profita pas de son hésitation pour parler, elle le laissa faire, attentive. Il allait faire quoi, la larguer? Lui dire que leur relation était interdite? Elle avait la trouille et elle espérait que cela ne se voyait pas.

« Je ne peux plus supporter tout ça. Tout ses secrets et ses mensonges pour que personne ne découvre notre relation. Il ne se passe pas un jour, pas une seule minute sans que je ne pense à toi Jude. Je … Je suis fou amoureux de toi. Je sais que c’est mal, mais c’est ce que je ressens. Je ne veux plus avoir à cacher mon amour pour toi. Je suis prêt à tout quitter, à faire n’importe quoi pour toi, pour qu’on puisse enfin être ensemble. » Elle le regarda sans trop comprendre. Zeck aimait enseigner - et ça, Jude le savait. Elle ne pouvait pas le laisser faire. Elle se sentirai trop égoïste. C'est comme si elle devait - bien qu'elle n'en était pas obligée ou que le besoin se faisait pas ressentir - arrêter le Glee Club pour Ezeckiel. C'était comme lui arracher le cœur. Elle ne pouvait pas. « Zeck, chéri... » Elle alla doucement s'assoir sur le bureau, prit ses mains dans les siennes, plongea ses yeux dans les siens. « Je... Non... Doit y avoir une autre solution! Si tu savais comme je t'aime et comme j'ai envie que notre amour soit enfin révélé au grand jour mais... » Elle baissa le regard sur leurs mains entrelacés, fit un signe négatif de la tête. « Je peux pas te laisser faire ça, mon amour. Même si c'est ton choix. Je... Je sais pas... Ça me fait me sentir égoïste, me demande pas pourquoi. Pourquoi serai-ce toi qui arrêterai d'enseigner? Je sais que tu aimes énormément ce métier. C'est comme si je devais arrêter le Glee Club, entre autres. » Elle fronça les sourcils.

FEATURING EZECKIEL S. JONES - R. JUDE H-LLOYD

Il releva son visage vers le sien, et Jude n'eut aucun autre choix que de plonger ses yeux dans les siens, observant avec attention les pupilles de Zeck, celles qu'elle aimait tant. « Je t’aime bien plus encore que mon métier d’enseignant. » Certes, mais cela ne réglait pas la question. Qu'il soit enseignant ou pas, les risques restaient les mêmes. Le pire pour Jude, serai la réaction de son entourage. Elle s'en fichait complètement qu'Ezeckiel soit professeur ou qu'il y ai une différence d'âge entre eux. C'était la réaction de sa famille qu'elle redoutait. Elle savait que sa famille de cœur, le Glee Club, la soutiendrai sans aucun doute. Ou du moins, certain. Elle se foutait de ce que pensaient les habitants de Fawkham ou pire, sa mère. Ça, elle n'en avait rien à foutre. Ce qu'elle redoutait, c'était la réaction de son père. Sa belle-mère était assez ouverte d'esprit et savait très bien que les sentiments ne se contrôlaient pas. Son demi-frère, bien qu'ils aient un lien assez ambigu, ils n'en avaient pas parlés jusqu'à présent. Ezeckiel ne savait pas, d'ailleurs, que Dean Lloyd était au courant pour lui et la belle Jude. Sa petite demi-sœur devrai s'en foutre royalement. Mais son père et son meilleur ami... C'était une autre histoire. Ils aimaient Jude, et la surprotégeaient depuis toujours - ou du moins, depuis que Mr Lloyd était de retour à Fawkham et que Saschà-Clyde et la brunette se connaissaient - et n'accepteraient sûrement pas qu'elle ai une relation avec le professeur Jones. Elle soupira doucement tant dis que le jeune homme poursuivit. « Et je ne te demanderais jamais de quitter quoi que ce soit pour moi. Je ne te demande pas de changer quoi que ce soit dans ta vie, j’aimerais simplement que tu prennes en considération le fait que mon métier nous empêche de vivre notre histoire, et c’est ce qui me rend malheureux. »

Il déposa un léger baiser sur le front de sa belle, puis elle alla se blottir dans ses bras, doucement. Il aimait son métier et Jude le savait. Et même s'il lui affirmait qu'il l'aimait plus que sa place d'enseignant, Jude n'avait pas bien envie de le laisser faire. Elle préférait presque attendre qu'elle quitte le lycée, quelques petites années encore. Pas bien longtemps, juste un an, encore. « Promet moi seulement d’y penser. » Elle acquiesça d'un signe de tête, releva son visage vers lui et déposa un doux baiser sur ses lèvres. « Promis. » Elle réfléchit quelques secondes. « Mais... Tu sais, que tu sois enseignant ou pas, ça ne changera pas le point de vue de mon père ou de mon meilleur ami. Quoiqu'il en soit, ils.. Euh... Seront assez perplexes par rapport à cela. » Jude laissa son regard vagabonder dans la pièce avant de replonger son regard dans celui de l'homme qu'elle aimait. « D'ailleurs, maintenant que mon père est proviseur, ça va être encore plus... On devra se montrer plus prudents. Certes le fait que tu abandonnes ta place d'enseignant pourrai nous éviter cela, mais comme tu l'as dis juste avant, tu ne me demanderai pas de quitter quoique se soit. Je ne veux pas te priver d'enseigner juste pour notre relation, même si elle nous ai très précieuse. » Elle lui fit un petit sourire. « Je t'aime. »