22 Février 2007 ; Wood River High School, Hailey, Idaho ; 22 : 57
Il était tard, la nuit était tombée sur la ville et avait recouvert les rues d’un épais manteau noir ainsi que d’une brume à couper au couteau. Sans la lueur vacillante des réverbères qui longeaient et illuminaient la ville d’une lumière criarde, il aurait été impossible de distinguer quoi que ce soit à plus d’un mètre. Sans compter la tempête infernale qui agitait furieusement les arbres et cinglait rageusement le visage des quelques habitants s’étant risqués à s’aventurer dans les rues sombres et glacées à une heure si tardive.
Il était tard, et pourtant Ezeckiel était toujours assis sur l’un des fauteuils inconfortables et élimés de la vieille salle des professeurs de Wood River High School.
Avec un soupir, le jeune homme remonta sa paire de lunette sur son nez, avant de déposer la copie qu’il venait de terminer de corriger avec quelques autres sur une petite table basse en bois de chêne qui trônait à coté du fauteuil, suite à quoi il lança un regard empli de dépit à la pile de feuille (encore bien trop haute à son goût) qu’il lui restait à noter.
Zeck ayant eu la malchance d’attraper une mauvaise grippe qui l’avait contraint à l’alitement et au repos durant les jours précédent, il avait pris un retard considérable dans la correction des copies de ses élèves. Il s’était par conséquence retrouvé avec une bonne centaine de copie à corriger, et ce pour le lendemain même.
Ezeckiel jeta un regard embué de fatigue au dehors par la petite fenêtre qui lui faisait face, et la tempête qu’il y vit ne fit que le rendre plus morose encore. Il détourna donc la tête de ce spectacle quasi apocalyptique pour se concentrer de nouveau sur les copies de ses étudiants.
Le jeune homme eut à peine le temps de lire quelques lignes lorsque un bruit sourd, semblable à un grattement d’ongle contre une porte, lui fit lever le menton. Il resta ainsi prostré dans le silence. Pendant quelques instants tout resta silencieux puis l’étrange bruit se fit entendre de nouveau. Zeck tendit l’oreille et fronça les sourcils dans un effort de concentration. L’étrange grattement ne semblait pas venir du couloir, mais pour s’en assurer, le jeune homme préféra vérifier. Sans surprise il découvrit un couloir désespérément désert. Il referma la porte et se figea. Il venait d’apercevoir une silhouette sombre derrière la fenêtre. La lumière diffuse que projetait l’applique murale dans la salle ne suffisait pas à éclairer l’inconnu. D’une démarche méfiante et le cœur battant, le jeune homme s’approcha de la fenêtre. Pas à pas, centimètre après centimètre, Ezekiel se rapprocha de la silhouette qui continuait à gratter la vitre de ses ongles. Puis, il fut enfin assez proche de la vitre pour apercevoir le visage du mystérieux invité. Son cœur eut un loupé douloureux lorsqu’il reconnut la jeune fille dont les longs cheveux blonds étaient agités par le vent.
-
Sarah ! S’exclama t’il avec surprise.
Sans attendre, Zeck ouvra la fenêtre. Une bourrasque de vent s’engouffra alors dans la pièce et fit s’envoler à travers la pièce le tas de copie que le jeune homme avait pris la peine de soigneusement ranger par ordre alphabétique. Mais pour l’heure, Ezeckiel se fichait bien des feuilles éparpillées dans toute la salle. Il aida la jeune fille à enjamber le mur puis referma la fenêtre des l’instant ou Sarah ce fut retrouvé à l’intérieur.
-
Que fait tu ici ?! Hurla t’il en se retournant vers la blondinette.
Sarah était bien plus jeune qu’Ezeckiel, et portait encore sur son visage les traits poupin de l’enfance. Ce qui ne la rendait pas moins jolie. La jeune femme arborait une chevelure d’un blond éclatant qui tombait dans son dos en une cascade de boucles anglaises. Ses yeux d’un bleu azur comme il en existe peu, pétillaient de malice et d’intelligence. Enfin, comme pour parfaire son visage d’ange, le physique de Sarah n’était pas sans rappeler celui des femme faisant la une des magasines de mode.
Sarah ne répondit pas à la question, elle se contentait de lancer à Ezeckiel un regard plein de tendresse et de joie, ses grands yeux bleus scintillant dans l’obscurité de la pièce.
Après quelques instants, le visage de Zeck finit par s’adoucir à son tour, son regard changea et s’attendrit. Il observait désormais la jeune fille avec allégresse.
-
Tu ne devrais pas être ici. Murmura t’il sans quitter les yeux d’azur de Sarah.
Il ouvrait de nouveau la bouche pour parler, mais la jeune femme l’en empêcha en posant un doigt sur ses lèvres.
-
Chut, susurra t’elle,
tu m’as tellement manqué.
Tout en prononçant ses parole elle approcha son visage de celui d’Ezeckiel et posa ses lèvres sur celle du garçon avec douceur. Des cette instant, l’esprit de Zeck se brouilla, il était à présent bien incapable de se rappeler ce qu’il s’était apprêté à dire.
Pourtant, une part du jeune homme ne cessait de lui répéter sans cesse qu’il ne devait pas aimer Sarah. Elle était son élève. Il était son professeur. En sortant ensemble ils encouraient d’énormes risquent. Ils violaient les lois, et si jamais tout deux venaient à se faire prendre … Ezeckiel ne préférait pas même y penser … Cette instant d’intense tendresse entre la jeune femme et lui ne devait pas avoir lieu, et pourtant, Zeck savourait ce moment, sans se soucier de quoi que soit. Lorsque Sarah et lui étaient ensemble, il n’y avait plus d’élève, plus de professeur, il ne restait plus que jeunes gens amoureux, et qui profitaient de cet amour.
Tandis que leurs baisers se faisaient de plus en plus ardent, Ezeckiel souleva lentement Sarah de terre et la porta jusqu’au fauteuil ou quelques copies étaient encore éparpillés. D’un revers de main, le jeune homme envoya valser les feuilles et étendit Sarah sur le velours élimé. Se perchant au dessus d’elle, il ôta sa chemise qui le faisait suffoquer, puis aida Sarah à ôter son propre haut. Ses lèvres retrouvèrent avec désirs celles de la jeune femme, leurs gestes se faisaient impatients désormais, et plus rien ne comptait pour eux mis à part la chaleur qui enflammait leurs corps.
Ce fut alors qu’un événement incongru vint rompre à jamais cette magie de l’instant. Le concierge du lycée, qui avait entendu du bruit dans la salle des professeurs, venait d’ouvrir la porte en grand. Il y eu tout d’abord quelques secondes de silence ou tout trois se toisèrent d’un air surpris, puis, en un geste rapide, Ezeckiel attrapa le tee-shirt de Sarah qui était tombé au sol dans la précipitation de leurs gestes, puis cacha la poitrine de la jeune fille de la vue du vieux concierge dont le regard s’aventurait un peu trop souvent sur cette partie du corps de la blondinette.
Zeck se leva doucement tout en levant les mains en l’air pour montrer au vieil homme rabougrie qu’il était inoffensif.
-
Ce n’est vraiment pas ce que vous croyez. Menti t’il d’une voix calme et assuré malgré la peur qui lui tordait l’estomac.
Je peux tout vous expliquer.
Le concierge, qui n’avait pas cessé de déshabiller du regard la partie du corps de Sarah qui n’était pas à découvert, leva enfin ses petits yeux exorbités vers Ezeckiel.
-
Ce n’est pas à moi que vous allez devoir expliquez ça mon gars, dit il d'une voix bourru,
mais à la police.
Sarah émit un petit gémissement apeuré, et Zeck du faire un effort surhumain pour s’empêcher de la prendre dans ses bras et de la rassurer.
Une demi heure plus tard, une dizaine d’agents de police avait envahi les couloirs du lycée.
03 Août 2010 ; The Rising Sun, Fawkham, Longfield ; 18 : 39
Trois ans été passé depuis l’arrestation d’Ezeckiel, et depuis, ce moment le hantait toujours. Le jeune homme n’avait pas cessé d’enseigner pour autant, il aimait plus que tout faire partager son savoir et, même s’il était désormais fiché pour détournement de mineur dans les dossiers de la police, il était hors de question pour lui d’abandonné ce qui lui tenait le plus à cœur. Ezeckiel n’était pas un homme mauvais, ni un pervers psychopathe, son seul tort avait été de tomber amoureux de son élève.
«
L’amour est peut être un crime finalement » se disait il dans ses moments de désespoir.
Depuis cette fameuse nuit, Zeck avait déménagé de nombreuses fois, et enseigné dans de nombreux lycée d’Amérique, mais rien de tout cela ne l’avait aidé à se sentir mieux. Il ne sentait plus à sa place nulle part. Il avait donc décidé, au début de l’été, de changer radicalement de vie en s’installant ici à Fawkham, petite ville paisible du royaume uni, ou il espérait enfin retrouver un quotidien heureux et stable.
La rentrée scolaire approchait à grand pas, et Ezeckiel se sentait de plus en plus nerveux, et de plus en plus seul. Zeck détestait la solitude, il n’avait jamais eu pour habitude de vivre une vie en sollitaire. Lorsqu’il vivait encore en Amérique, il avait une famille et des amis auxquels il tenait énormément. Aujourd’hui tout le monde lui avait tourné le dos, la plupart de ceux qui lui était proche le pensait coupable d’un acte affreux, et l’avait chassé de leur vie. C’était pour cela que le jeune homme passait ses journées à la découverte des trésors de culture et d’architecture que lui offrait sa nouvelle ville. Ezeckiel était un homme intelligent, et il était sans cesse à la recherche de nouvelles connaissances à acquérir et de nouveau savoir qu’il pourrait ensuite transmettre à ses élèves.
Ce jour la toutefois, Zeck se sentait mal. Un vide immense compressait son cœur, si bien que lorsque dix huit heures sonnèrent, Ezeckiel estimât que pour une fois, certainement la première fois de sa vie d’ailleurs, qu'il allait s’autoriser un verre d’alcool fort pour noyer son chagrin.
Il entra donc dans le premier bar devant lequel il passa, s’installa au bar et commanda un wiski. Zeck observa tout d’abord le liquide ambré dans son verre, puis plongea les lèvres dans l’alcool avec lenteur. Une sensation de brûlure inconnue lui enflamma la gorge, puis réchauffa peu à peu son être. Le jeune homme aima immédiatement cette sensation de chaleur qui l’envahissait, une chaleur qu’il n’avait pas ressenti depuis bien trop longtemps. Lorsqu’il eut fini son verre, il en commanda donc un deuxième, puis un troisième.
Ce fut alors qu’il entamait son quatrième verre qu’Ezeckiel senti quelqu’un s’asseoir sur le tabouret voisin du sien. Il tourna alors la tête vers la nouvelle venue, (apparemment c’était une femme puisqu’elle posa sur le bar un sac à main) et resta bouche bée un instant. Une jolie jeune femme aux longs cheveux bruns et aux yeux noisette le regardait d’un air amusé. Des le moment ou les prunelles de la belle rencontrèrent les siennes, Zeck su qu’il ne saurait plus jamais seul.
03 Septembre 2010 ; St-German High School, Fawkham, Longfield ; 15 : 15
La matinée d’Ezeckiel s’était merveilleusement bien passée. Le jeune homme avait donné ses premiers cours de littérature de l’année, et ses méthodes de travail avaient, semblait il, remportés un grand succès auprès de ses nouveaux élèves.
Zeck se sentait empli d’une allégresse retrouvée lorsqu’il donna un tour de clé dans la serrure de la salle de cours qu’il venait de quitter. Son emploi du temps serait chargé cette année, mais cela ne lui faisais pas peur, bien au contraire, il en était très content. Ce fut avec un grand sourire que le jeune homme se mit en marche vers la cafétéria. Il mourrait de faim à présent.
Marchant d’un pas vif, il se mit à observer de plus près ses nouveaux horaires si bien qu’au détour d’un couloir, il ne pu éviter la collision avec une élève qu’il envoya valser à terre sans le vouloir.
-
Pardonnez moi. S’excusa t’il tout en se précipitant pour aider la pauvre jeune fille à se relever.
Je ne vous ai pas vu arriver.
Vous allez bien ?
Rien de …
Il s’interrompit soudain, le cœur battant la chamade. Zeck venait de reconnaître Jude H-Lloyd, la jeune femme qu’il avait rencontrée au bar un mois plus tôt, et avec qui il était plus ou moins sortit durant l’été.
-
Tu...
Tu es prof ici ?! S’exclama soudain Jude d’un air choquée et complètement perdu.
Ezeckiel mit un certain temps à répondre, il n'arrivait pas croire que l’histoire était sur le point de se répéter. «
Non !
C’est impossible ! Se disait il.
Impossible ! » Il se rendit soudain compte que la jeune femme attendait une explication de sa part.
-
Et bien... Se mit il à bafouiller, cherchant quoi dire.
Oui,
je suis le nouveau prof de littérature.
Et toi !
Zeck s’interrompit lorsqu’il se rendit compte qu’il s’était mis à hurler. Avant de reprendre, il pris le soin de jeter un regard dans le couloir, mais il n’y avait personne, élèves et professeurs étaient tous en cours, ou en train de profiter de la chaleur des derniers jours d’été.
-
Et toi, répéta t’il à voix basse cette fois ci,
tu aurais pu me dire que tu étais lycéenne ici !
Le jeune homme vit distinctement le visage de la jolie Jude s’empourprer de colère et lever les yeux au ciel.
-
Ah ouais ! S’écria t’elle, ce qui eu pour effet d’augmenter les craintes de Zeck.
Tu m'avais dit que tu enseignais,
mais pas où !
Ezeckiel se mit à épier de part et d’autre du couloir, il fallait absolument qu’il trouve un endroit isolé pour parler avec Jude. Faire une crise au beau milieu du lycée n’était pas, pour ainsi dire, une très bonne idée. Il empoigna donc le bras de la jeune femme et l’entraîna jusqu’à la salle de classe la plus proche. D’une main tremblante il déverrouilla la porte, fit entrer Jude à l’intérieur puis referma la porte derrière lui.
-
C'est vrai,
d'accord, avoua t’il en se retournant vers la jeune femme.
Je ne t’ai pas tout dis.
Mais en même temps… Il s’arrêta pour observer Jude de la tête au pied, et immédiatement il sentit sa colère le quitter.
Tu fais tellement peu lycéenne ...
Il avait parlé d’une voix douce et tendre qu’il n’avait pas pu contrôler. Jude croisa alors ses bras sur sa poitrine et fronça légèrement les sourcils. Lentement, Zeck vit la colère de la belle se transformer en crainte. En cet instant, Ezeckiel aurais tellement aimé la serrer contre lui et lui dire que tout allait bien se passer, mais il était impuissant et, il fallait l’avouer, lui aussi avait peur.
-
On...
On fait quoi,
alors ? Bredouilla Jude d’un air inquiet.
Zeck ne pus m’empêcher de s’approcher et de prendre les mains de la jeune femme dans les siennes. Ce simple contact déclancha en lui une sensation de bonheur insaisissable.
-
On pourrait se faire virer ... Murmura t’il.
En prononçant ses mots, le cœur d’Ezeckiel était déchiré entre sa crainte de revivre ce pourquoi il avait quitté l’Amérique, et son amour grandissant pour Jude. Ils restèrent tout deux en silence, les yeux dans les yeux, puis, comme s’il s’agissait la d’un geste naturel, leurs doits s’entremêlèrent. Leurs visages étaient désormais si près l’un de l’autres que Zeck pouvait sentir le souffle chaud et le parfum sucré de Jude. Il se sentait comme envoûté par la beauté et la douceur de la belle.
-
Je...
On peut prendre le risque,
non ?
Pour toute réponse, Zeck posa ses lèvres sur celle de Jude et l’embrassa tendrement. Il su alors qu’il n’aimait pas Jude de la façon dont il avait aimé Sarah, c’était un sentiment bien plus fort et irrépressible. Il se rendit compte qu’il mourrait de chagrin si tout deux venaient à être séparé. Ezeckiel se promis alors que quoi qu’il arrive, il ferait n’importe quoi pour protéger leur amour, et ceux, quelques soit les contraintes que leur imposerait leur relation.